Je suis de la ville de Québec. Si vous ne le
saviez pas, vous êtes maintenant au courant. Voilà, c’est réglé. Mais le but de
cet article, n’est pas d’écrire une autre page redondante de la rivalité entre
Québec et Montréal. Je laisse ça à nos péquenots bien de chez-nous, assis sur
la galerie avec leur .12 à gros sel. Si ça ne vous fait rien, je vais garder ma
tête pour une analyse qui se tient debout.
Les deux villes, ont
souffert de la perte d’une équipe sportive majeure. Pour une raison obscure, la
perte des Nordiques de la Ligue Nationale
de Hockey à Québec a fait beaucoup plus de dommage dans le moral collectif que
le départ des Expos à Montréal. Il faut dire qu’on a bien travaillé pour vous
marteler que le baseball majeur était malade avec des salaires complètement
fous. C’est vrai qu’un peu plus de deux fois le salaire d’un joueur de hockey,
avec le potentiel de quatre fois plus de revenus aux guichets, un contrat de
télé à des années lumières de celui du « gouret », et des revenus
publicitaires à ne plus savoir où les mettre, c’est quand même plus débile que
dans la ligue la plus pauvre du sport. Mais bon quand une vache à lait a de
l’influence dans les médias, on a parfois droit à des commentaires et des
analyses d’une intelligence douteuse.
Québec mène la charge
et change
Or, quand les Nordiques ont quitté, je me
souviens que le soir même de l’annonce définitive, j’étais dans le
stationnement du stade Municipal. J’allais assister à un match de baseball de la
LBÉQ. En regardant vers la haute ville,
j’avais une boule dans l’estomac. MA ville venait de perdre son âme.
L’atmosphère était triste par cette belle soirée ensoleillée. Nous étions
pourtant plus de 2 000 dans les gradins, à faire suer les bénévoles
qui ne savaient plus où donner de la tête avec tout ce monde qui les avaient
surpris. Sans le savoir ce soir là, les gens de Québec venaient peut-être de
mettre la première pierre à ce que l’on sait aujourd’hui. Des gens s’étaient
déplacés pour aller encourager leur équipe de baseball junior. On avait besoin
de sentir d’autres émotions. Et quoi de mieux que ce sport qu’est le baseball
pour nous réconforter? Plus tard dans l’été, ce fut 3200 paires de fesses qui
s’entassaient dans les gradins. Le même automne plus de 10 000 en
faisaient autant au stade du PEPS pour voir le Rouge et Or au football
universitaire canadien. Ont ensuite échoué au hockey, les Rafales de la Ligue Internationale
et les Citadelles de la Ligue Américaine.
Mais les Remparts ont pris le relais avec le succès que vous connaissez. Même
la ligue Nord Américaine de Hockey a rempli le Colisée. Le Challenge Bell de
Tennis a été choisi pat l’ATP meilleur tournoi au monde de sa catégorie, les
Capitales de Québec, sont nés dans la Ligue Northeast; Un circuit
indépendant. Le Rouge et Or frôle maintenant les 20 000 spectateurs.
Certains rêvent d’une concession dans la Ligue Canadienne de Football,
et on attend le retour de nos Nordiques. MA ville a retrouvé sa splendeur, ses
sourires et sa belle folie. Elle a toutefois beaucoup changé. Le paysage n’est
plus tout à fait le même. Les édifices commerciaux, les condos, les maisons
poussent comme des champignons. Un nouveau maire, une nouvelle administration
municipale, ont grandement contribué. Mais aussi, une population qui en a eu
assez d’être toujours raisonnable quand venait le temps de dépenser de l’argent
public alors qu’ailleurs, on pigeait dans les subventions du gouvernement. Une
population qui a décidé d’embarquer derrière ce qu’elle avait, sans regarder le
sacro-saint calibre pour s’amuser comme le font les Américains avec leurs
équipes universitaires et leurs équipes de circuits mineurs.
Montréal ne sait plus
Pendant ce temps, Montréal, ne sait plus où
elle se situe. La ville tombe en ruines, son stade de baseball qui n’en était
pas un à l’époque, ne sert plus à grand-chose. Elle se salit, manque de
propreté et aussi de netteté pour ne pas dire d’honnêteté. Plus rien ne
ressemble à ce Montréal qu’on aimait. Pourtant, le moral est plutôt bon. Comme
si on avait décidé que c’était bien d’être passé second derrière Toronto, et de
couler à pic devant les autres grandes villes d’Amérique. On se plait à être
les négligés. On est devenu la
Regina de l’est au lieu d’être encore la New York du Canada.
On ne sait plus qu’est-ce qui attire les gens à Montréal. Se retrouver au coin de
St-Denis et Ste-Catherine pour regarder le monde passer bien assis sur une terrasse?
On peut faire ça à Philadelphie, vous savez, ou même à Baie-Comeau le long du
sentier pédestre avec vu magnifique sur le fleuve en plus. Aller y voir se
produire un artiste québécois lors d’un des nombreux festivals? Certainement
pas, si je suis un voisin du sud, et pourquoi je partirais de Rimouski quand il
viendra chez-moi de toute façon? Y visiter le Biodôme? Bien pourquoi pas
Marineland ou même les zoos de San Diego et St-Louis? Le Vieux Montréal? Je ne voudrais
pas vous faire suer, mais je vais rester chez-moi ou même aller à Boston ou
Nantucket. Voir un spectacle permanent de renommé international comme Elvis
Story à Québec ou Cats sur Broadway? Non plus. Magasiner dans les grandes
boutiques? Encore là, New York passe loin devant, et même Québec, Capitale
Nord-Américaine du shoping avec le plus grand nombre de magasins et de boutiques
par habitant. Bref, Montréal s’amuse localement avec ses festivités pour sa
propre population. Elle n’a plus rien de différent avec Cleveland, Detroit,
Pittsburgh, Atlanta ou Oakland.
Qu’est-ce qui nous attire encore à Montréal? Le
Festival International de Jazz! Ah! Là, juste là…on s’approche! Le Grand Prix de
Formule 1! Voilà deux activités qui accrochent non seulement les Montréalais,
mes les gens de toute la province et du monde entier. Mais cette ville a besoin
de plus que ça. Ce n’est pas l’Impact de la MLS qui fera faire un détour aux gens.
Entendons-nous. C’est bien que Montréal soit dans la MLS. C’est même très bien
si l’équipe a du succès aux guichets. Mais il faut quelque chose qui attire les
gens de façon perpétuelle. Comme les Expos le faisaient. On allait aux Expos de
partout en province, du Canada et des États-Unis. On en profitait pour y passer
la fin de semaine. Ce sport fait partie de NOTRE culture.
Sans émotion
Une équipe majeure de sport n’est pas tout dans
une ville. Québec l’a prouvé. C’est peut-être même pour ça qu’on se sent si près
du retour de la LNH. Montréal
peut vivre sans équipe de baseball majeur, mais elle doit avoir une boule dans
l’estomac. Ça doit lui faire mal d’avoir perdu son équipe. Ce qu’on ne sent pas
chez le Montréalais. Oui, je sais, VOUS, ça vous fait mal, mais LE Montréalais
lui? Quand Québec a perdu son équipe, les gens ont vécu un deuil. Ils se sont
ensuite tournés vers le hockey junior. « Ok, on est en maudits! Vous nous
avez enlevé notre équipe, mais vous ne partirez jamais avec notre amour pour ce
sport! » Voilà, le message que les gens de Québec ont lancé à tout le
monde. C’est ce message que j’attends et que je n’entends pas après ces années
sans baseball majeur. Les Expos, c’était l’équipe de tout le Québec. C’est ce
qui réunissait les amateurs de sports de Québec et Montréal l’été. Pas de
rivalité! On était tous des supporteurs des Expos. Trois-Rivières vient d’entrer
dans la Can-Am. Québec
y était déjà depuis 14 ans. De petites villes du Québec attirent plusieurs
amateurs dans les parcs de la LBÉQ. Mais
à Montréal? On a été obligé de jouer un match d’exhibition entre les Capitales
et les Aigles de la Can-Am
dans un parc qui ressemblait davantage au terrain du parc St-Mathieu qu’à un
stade de baseball. Il y a quand même eu 1200 personnes. Imaginez dans un petit
stade adéquat par un beau soir de juillet à analyser un match de baseball pro
avec l’odeur des hot-dogs et le vendeur qui vous crie le nom de ses
rafraîchissements?
Retour probable de la MLB
Je vous avoue bien honnêtement que j’ai
toujours cru au retour du baseball majeur à Montréal. Avant même qu’il quitte. D'abord, parlons des vraies choses. Le retour des Nordiques à Québec
était moins probable que celui des Expos à Montréal. Le hockey est un sport local aux États-Unis et national au Canada. La croyance
veut que le hockey soit impopulaire chez les voisins. Rien de plus faux. Ils
adorent le hockey. Le problème, c’est qu’on a mal implanté certaines
concessions. Une équipe de hockey de la
LNH aurait plus de chance de réussir à Providence ou dans
n’importe quel « Springfield » qu’à Phoenix ou Kansas City. Ces
villes sont saturées d’équipes majeures et aussi universitaires d’autres
sports. Dans des villes comme Tulsa on a attiré plus de 17 000 personnes
pour du hockey de la ECHL.
À Orlando, les Solar Bears attiraient 18 000 personnes dans la
LIH. Il y a 5 équipes pros au Texas, et
aucune n’est sous la barre des 5 000 spectateurs de moyenne. Le dollar
loisir et sportif est très sollicité dans les grandes villes aux États-Unis.
Normal que le sport moins culturel passe loin derrière, si le prix de vos
billets n’est pas plus qu’abordable.
Il y a donc un plus grand potentiel de
concessions pour du hockey qu’il y en a pour du baseball. C’est beaucoup plus
difficile de trouver un marché pour le baseball majeur. Les Expos ont mis du
temps à quitter parce qu’on cherchait un endroit pour les relocaliser. On ne se
ruait pas à la porte de Bud Selig. Tu peux construire un amphithéâtre aux États-Unis
et le rentabiliser avec une équipe universitaire de basket et des spectacles en
attendant une équipe majeure, mais au baseball que faire d’un stade qui frôlera
le milliard si tu n’as personne qui jouera dedans? Il n y a pas beaucoup de
solution pour relocaliser une équipe en Amérique. Ni pour une expansion. Les
chances d’un retour du baseball majeur à Montréal sont donc excellentes. Elles
l’ont toujours été. Sauf qu’il faudra être encore plus patient qu’à Québec avec
les Nordiques.
On doit être plus méthodiques au baseball en
raison de la construction onéreuse d’un stade. Le projet doit être plus étoffé.
Montréal n’en est pas encore là. Les problèmes dans le milieu municipal, n’aident
pas la cause actuellement. Toutefois, il faudra bien un grand projet comme
celui de bâtir un stade pour redonner et se redonner confiance, n’est-ce pas?
Le timing n’est pas encore tout à fait le meilleur. Mais il faut s’y préparer.
Ça pourrait bien être le projet qui relancera la ville. Il faudra vendre cette
idée. Il faut absolument commencer à tâter le terrain pour justement en trouver
un. Il faut une maquette, quelque chose qui soit prêt à présenter quand le
timing sera le meilleur.
Lancez ce foutu message!
D’ici là, il faut que Montréal retrouve
son goût pour le baseball. Il faut se
rendre dans les parcs de la LBÉQ
en discuter, échanger sur les joueurs, en faire des analyses, amener une
concession de la Can-Am
dans la région. Pas parce que ça va ramener une équipe de la MLB, parce qu’il faut que les
Montréalais lancent leur message. Pas au baseball majeur, à eux-mêmes! Il faut
se convaincre que les Expos n’étaient pas le baseball. Il faut pouvoir
démontrer que même s’ils nous manquent, on ne pourrait pas vivre sans baseball
dans sa ville. Il faut encore s’en passionner pendant que les éléments se
mettront discrètement en place pour un retour aux majeures. Québec et Trois-Rivières ont
envoyé leur message à qui veut l’entendre. Ils peuvent se passer des Expos,
mais pas de baseball. Car ce n’est plus de la tristesse quand on la perpétue, ça devient
pathétique après toutes ces années. Alors Montréal? Le message viendra t-il
enfin? Cette ville aime t-elle le baseball? Se lèvera t-elle à son tour pour se le dire?